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Conjoncture et marchés décembre 2025

Panorama économique

Le mois de décembre demeure une période classique pour se positionner sur les anticipations de la croissance mondiale l’année suivante. Ce sujet, déjà évoqué en novembre dernier, n’a guère évolué sur ces dernières semaines, et reste dans une dominante positive. En effet, le consensus des économistes prévoit une progression globale de l’activité proche de +3% en 2026, voire même un peu au-delà. Toutes les principales zones géographiques devraient participer à cette tendance favorable.

Comme c’est maintenant le cas depuis de nombreuses années, les États-Unis vont contribuer à cette bonne performance du monde économique. Plusieurs facteurs peuvent justifier un tel scénario. L’un de ces principaux facteurs à court terme correspond aux futures décisions qui seront prises par la Banque Centrale américaine. Celle-ci va continuer d’ajuster sa politique monétaire, comme cela a été le cas cette semaine avec une troisième baisse des taux sur 2025 (-1/4 de point à 3,50%).

Ce mouvement va en principe perdurer au cours des prochains trimestres, surtout si le prochain président de la Fed, qui remplacera Jerome Powell, s’avère plus accommodant ! Par ailleurs, comme cela s’est produit tout au long de l’exercice 2025, le poids des investissements sera également un autre contributeur significatif à la bonne tenue de l’activité américaine. Ces investissements vont essentiellement concerner l’ensemble de l’écosystème lié à la technologie, et en priorité tout ce qui concerne l’Intelligence Artificielle. Dans cette hypothèse, le PIB américain est attendu en hausse de +1,7%/+1,8%. La principale inconnue qui pourrait impacter ce scénario (dans un sens ou dans un autre) va concerner le comportement des ménages américains. En effet, à ce jour, de nombreuses questions font référence à la capacite d’une partie de la population,et en particulier la moins aisée, de continuer à maintenir un niveau élevé de dépenses. Les dernières analyses en la matière font référence à l’évolution du moral des américains. Comme le montre le graphique ci-dessous, celui-ci continue à se dégrader en novembre, avec un indicateur qui se rapproche des points les plus bas depuis 10 ans.

Évolution de l’indice de confiance du consommateur selon l’enquête du Conference Board(CPR AM – décembre 2025).

De manière fort logique, la dynamique des dépenses des ménages dépend de l’évolution de l’inflation et de celle du marché de l’emploi. Sur ce premier point, force est de constater que les prix de détails continuent à se positionner sur des niveaux supérieurs aux normes historiques (proches de +2%). Cette tendance est encore liée aux nouvelles taxes douanières imposées par l’administration républicaine sur les implorations américaines.

Le second sujet d’inquiétude des américains concerne la dégradation progressive du marché de l’emploi. À défaut de pouvoir analyser des chiffres officiels, les données alternatives montrent encore une poursuite des destructions de postes, et un risque de remontée du taux de chômage. Si la consommation devait s’affaiblir dans les prochains mois, cela serait une mauvaise nouvelle pour D. Trump avant les élections à mi-mandat de novembre 2026 (Midterms). Une telle situation obligerait alors le président américain à adopter une attitude moins agressive et discriminante envers ses citoyens.

Le contexte européen a souvent été décevant cette année, les statistiques économiques récentes affichent une légère amélioration, à l’image des indicateurs avancés du mois de novembre. L’indice PMI composite de la zone euro progresse de +0,3 point à 52,8, soit un plus haut depuis mai 2023, grâce notamment à une bonne tenue du secteur des services.

Indicateur PMI composite de la zone euro (Trading Economics décembre 2025).

Si la croissance modérée du « continent » va donc se prolonger sur le dernier trimestre de l’année, tous les économistes demeurent concentrés sur les perspectives conjoncturelles allemandes. Comme évoqué depuis de nombreux mois, le fameux plan de soutien allemand devrait enfin se concrétiser sur le 1er trimestre 2026, avec notamment celui dans les infrastructures à hauteur de 500 milliards d’euros, dont le budget a été validé par les responsables politiques allemands. Dans ces conditions, l’activité outre-Rhin va retrouver un rythme vigoureux qui permettra à la zone euro de renouer avec une prospérité structurelle (+1,3% attendu en 2026), et ceci malgré les incertitudes politiques françaises et un moindre essor du développement économique en Espagne.

L’environnement du monde des affaires demeure toujours aussi délicat en Chine. Les récentes statistiques du côté des entreprises affichent des indicateurs mitigés à l’image de l’indicateur avancé PMI composite officiel qui repasse sous la barre des 50 points (soit en zone de stagnation) à 49,7, et revient sur les plus bas de décembre 2022. Les difficultés de surcapacités industrielles, malgré une bonne tenue des exportations en novembre, continuent de peser sur le potentiel de développement du pays. Ces circonstances sont d’autant plus délicates à ce jour, alors que l’activité domestique prolonge sa faiblesse. La hausse des ventes de détail en octobre ralentit encore d’un cran en novembre (+2,9% sur 12 mois contre +3% en septembre). Les investissements sont en repli de 11% sur un an, et la production industrielle affiche également son plus mauvais score depuis le début de l’année. En complément de ces données négatives, il faut rajouter le secteur immobilier qui poursuit sa crise, avec des prix des surfaces de logement qui ne cessent de baisser. Afin de maintenir un niveau de croissance raisonnable, les autorités politiques n’auront d’autres options que de prendre des mesures de soutien monétaire (cf. graphique ci-dessous) et budgétaires en 2026.

Perspectives d’évolution des taux directeurs chinois (Capital Economics – décembre 2025).

Marchés Financiers

Les actions européennes ont bravé avec succès les multiples tempêtes de l’année 2025

À quelques jours avant la fin de l’année, l’indice Euro Stoxx 50 est en hausse de 14% (au 10 décembre 2025) devançant nettement les actions américaines qui progressent de 4% (S&P 500 en euros).

Performances des indices actions - 2025 (en euros)

Les incertitudes et les impacts des tarifs douaniers, l’instabilité politique en France mais aussi la force de l’euro par rapport au dollar ont pesé sur l’activité des entreprises européennes tout au long de l’année. Cela étant la remise en cause des équilibres géopolitiques et du contexte sécuritaire européen après l’élection de Donald Trump, ont constitué un réel catalyseur pour la mise en place de réformes évoquées dès septembre 2024 par Mario Draghi, afin de soutenir la croissance et la compétitivité des entreprises de la région. Dans ce contexte, les annonces faites début 2025, par le chancelier allemand Friedrich Merz, de mise en place d’un fonds spécial pour les infrastructures, la transformation énergétique et la modernisation nationale doublée d’un assouplissement du frein à l’endettement de l’État allemand, ont été largement saluées par les marchés puisque constitutives d’un changement de paradigme en Europe.

Après un premier trimestre en fanfare, les actions européennes ont pourtant évolué dans un corridor pendant les deux trimestres suivants. Pourquoi ?

Les entreprises européennes ont tout simplement été incapables de délivrer les croissances de bénéfices attendues par le marché. Après avoir décliné de -2% en 2023 puis de -1% en 2024, les bénéfices par action des entreprises ont été revus à la baisse tout au long de l’année. Alors que le consensus attendait une hausse des bénéfices par action de 8% en début d’année, ceux-ci termineront probablement l’année 2025 sur une hausse de seulement 1%. La progression des indices européens repose donc presque exclusivement sur des expansions de multiples de valorisation en anticipation d’une amélioration des bénéfices futurs qui tardent à se matérialiser. De fait, le niveau de valorisation actuel des actions européennes est loin d’être bon marché. Le ratio de prix sur les bénéfices attendus en 2026 est actuellement de 14,5 fois, soit un niveau proche de la moyenne des indices européens sur 20 ans.

De surcroit, il est fort probable que le consensus soit obligé de revoir à la baisse ses attentes de croissance actuelles de 12% pour l’année 2026. Elles semblent ambitieuses dans un contexte de faible croissance potentielle, de concurrence accrue de la part de la Chine notamment dans l’industrie, les biens de consommation courante ou l’automobile et d’un niveau de change euro vs dollar qui reste discriminant pour la compétitivité des entreprises européennes.

Rendement du dividende des actions européennes vs taux des obligations allemandes à 10 ans

Nous arrivons à la même conclusion si l’on compare le rendement du dividende des actions de la zone euro qui est équivalent au taux allemand à 10 ans. Ainsi à défaut de croissance bénéficiaire l’intérêt des actions européennes reste très limité par rapport à un actif sans risque.

Pour autant certains secteurs européens présentent un intérêt pour les investisseurs.

C’est le cas du secteur bancaire, qui malgré une excellente performance (le secteur des banques européennes – indice Stoxx Europe 600 banques – progresse de 60% depuis le début de l’année) reste l’un de nos secteurs favoris.

Performance comparée du secteur bancaire européen vs indice de marché européen (source Datastream, décembre 2025)

Après une longue période de taux bas, le retour de l’inflation et la repentification des courbes de taux européennes ont permis aux banques de restaurer leurs marges nettes d’intérêts. La règlementation plus stricte du secteur bancaire mise en place à l’issue de la crise financière a également forcé les banques à améliorer la qualité de leurs bilans et à transférer une grande partie de leur risque de crédit à d’autres acteurs de la sphère financière. Les réductions de coûts déjà entreprises et qui vont se poursuivre grâce à l’intégration de l’intelligence artificielle dans les processus opérationnels du secteur ont aussi permis au secteur de retrouver des niveaux de rentabilité des fonds propres équivalents à ceux des banques américaines.

Rentabilité des fonds propres des banques en Europe vs aux États-Unis (source Gavekal, décembre 2025)

Bien que les banques soient un secteur cyclique, elles sont peu exposées aux conséquences de la guerre tarifaire et à la baisse du dollar contre euro. Elles bénéficient à l’inverse d’un retour de la croissance en Europe. En cette période de fin de cycle elles profitent même des mouvements de consolidation sectoriels à travers la reprise de l’activité de fusions acquisitions. Leurs bénéfices sont attendus en hausse de 10% en 2026 et 11% en 2027 auxquels il faut rajouter un rendement du dividende de l’ordre de 5% et des rachats d’actions incrémentaux. Toutes choses égales par ailleurs, le potentiel de performance du secteur pourrait donc dépasser les 15% en 2026.

Les services aux collectivités font également partie des secteurs que nous mettons en avant. C’est un secteur domestique, défensif par nature car peu sensible au cycle économique, un véritable atout en période d’incertitudes macro-économiques. Le secteur est généralement catégorisé comme un secteur « value », la croissance de ses bénéfices est stable mais peu élevée. Les valeurs qui le constituent s’échangent sur des niveaux de multiples inférieurs à ceux du marché, elles offrent cependant des dividendes généreux, un atout alors que la croissance en Europe est encore faible. La fiche d’identité du secteur est pourtant actuellement en pleine mutation sous l’impulsion de nouveaux moteurs de croissance.

Contribution à l’évolution de la demande d’électricité en Europe (source Société Générale - décembre 2025)

Les priorités données à l’indépendance et à la transition énergétiques mais aussi les besoins colossaux en énergies décarbonées pour le déploiement des capacités liées à la mise en œuvre de l’intelligence artificielle entrainent une hausse importante de la demande pour le secteur. L’excellente performance des services aux collectivités en hausse de 25% cette année est le reflet de cette nouvelle dynamique.

Pour autant, ce segment reste attractif en matière de valorisation avec un ratio de prix sur bénéfices par actions de 14,3x comparable à celui des actions européennes et un rendement du dividende de 4,4% contre 3,3% pour l’indice européen.