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Flash marchés. 16 mars 2023

1. L’élément déclencheur : les faillites de trois établissements bancaires américains.

Tout a commencé le mercredi 8 mars avec l’annonce de la mise en liquidation de la Silvergate Bank, petite banque régionale exerçant son activité dans les cryptomonnaies et faisant face à une vague de retraits précipités.

Dans le même temps la SVB, banque favorite du secteur technologique, connait aussi des retraits très importants qui la contraint à vendre précipitamment un portefeuille d’obligations en constatant des pertes. Déclarée en faillite au cours du week-end suivant, l’affaire est d’autant plus sérieuse que la SVB était devenue la 16ème banque des États-Unis avec 209 milliards de $ d’actifs.

Les difficultés de ces établissements illustrent les effets potentiellement négatifs, tant sur leur passif (retraits massifs) que leur actif (baisses des valorisations), de la forte hausse des taux d’intérêt opérée par les banques centrales depuis plus d’un an.

À partir de là, afin de restaurer la confiance dans le système, la FED a très rapidement pris des mesures exceptionnelles visant à assurer une garantie totale des dépôts et la liquidité des banques sous forme d’une nouvelle facilité de crédit à un an.

2. Notre analyse de la problématique propre au secteur bancaire américain.

Le contexte des trois établissements ayant fait défaut à ce stade était bien particulier : une activité centrée sur des secteurs en difficulté (technologie ou cryptomonnaies) et des bilans gérés de manière peu prudentielles.

Le secteur bancaire américain est globalement mieux capitalisé qu’en 2008. Le questionnement porte toutefois sur les petits établissements (moins de 250 milliards de $ d’actifs) dont la réglementation a été assouplie en 2018.

À ce stade, si on ne peut exclure l’apparition de nouvelles vulnérabilités parmi les plus petits établissements, il ressort que les autorités monétaires ont appris des précédentes crises et continueront à réagir rapidement en cas de nouvelle alerte.

3. Le cas du Crédit Suisse.

La banque Crédit Suisse est en difficulté depuis de nombreuses années et sa valorisation boursière a déjà fortement baissé depuis dix ans. Les craintes liées au secteur bancaire ont accentué la défiance à l’égard de cet établissement.

La situation en ce qui concerne la banque suisse semble fondamentalement différente des cas observés aux États-Unis où il s’agissait plus d’un problème de liquidités. Dans le cas de Crédit Suisse, il s’agit plus d’un risque de solvabilité souligné notamment par le refus du principal actionnaire, un fonds saoudien, de participer à une augmentation de capital devenue nécessaire.

Les enjeux sont également différents dans la mesure où Crédit Suisse est considéré comme systémique et figure ainsi parmi la liste des établissements « too big to fail ». La défiance pouvant accélérer le rythme de retraits des dépôts, le risque pouvait alors se transformer en crise de liquidités, d’où le crédit de 50 milliards de $ accordé par la Banque nationale suisse. Là encore la détermination des banques centrales à protéger le système financier devrait permettre de restaurer la confiance.

4. Les implications macroéconomiques.

Les premières conséquences sont d’ordre économique : un certain nombre de banques vont probablement chercher à consolider leur bilan et ainsi accélérer le durcissement de leurs conditions de crédit. Aux États-Unis principalement, cela pourrait exercer un frein supplémentaire à l’activité économique au cours des prochains mois.

Sur le plan monétaire, les banquiers centraux vont être tiraillés entre deux objectifs qui paraissent désormais antinomiques la recherche de la stabilité des prix (qui justifierait de poursuivre le resserrement de leur politique de taux d’intérêt) et l’objectif de préserver la stabilité du système financier. La BCE vient de débuter cette phase délicate en annonçant aujourd’hui une nouvelle hausse de 0.50% de ses taux directeurs tout en rappelant sa grande vigilance à l’égard du secteur bancaire et vouloir assurer la liquidité nécessaire autant que de besoin.

Au final, les tensions devraient pouvoir s’apaiser dans les prochains jours en considérant la réactivité avec laquelle les autorités ont pris les choses en main. En l’absence de nouvelles difficultés, la confiance va progressivement revenir mais les investisseurs demeureront probablement un cran plus prudent.