Un niveau de dette publique qui dépasse la valeur du PIB
La pandémie due au Covid-19 a fortement affecté l’ensemble des pays et s’est traduite par une récession mondiale en 2020. Les tentatives pour limiter les impacts de cette crise se sont traduites en particulier par une hausse sans précédent des dépenses publiques dans les pays développés, symbolisées par les plans de relance successifs de l’administration américaine ou encore le plan Next Génération EU en Europe (750 milliards d’euros).
En l’absence de recettes suffisantes dans un contexte de croissance affaiblie, le financement de ces déficits se traduit par la dérive des niveaux de dettes publiques des États, dont le poids dépasse désormais la valeur du PIB dans la plupart des grandes économies mondiales, dépassant par exemple le niveau de 120% en France à fin 2020.
La hausse de la dette, moteur historique de la croissance
La dette publique n’est pas un enjeu nouveau. Les finances publiques françaises se caractérisent par un déséquilibre permanent depuis le premier choc pétrolier de 1973. La fin des Trente Glorieuses ouvrait alors une période de croissance faible que les différents gouvernements ont cherché à compenser par l’augmentation des déficits et les dettes publiques. D’une manière générale, la croissance s’est ainsi financée en partie à crédit, surtout depuis la crise financière de 2008.
Quel est le seuil maximum qu’un État peut soutenir ?
La dette n’est pas un problème économique par essence. L’orthodoxie des finances publiques n’est pas remise en cause si la dette sert à accroître le potentiel productif. La dette qui finance des infrastructures publiques, le système éducatif, la recherche et l’innovation est une dette « utile ». Les investissements en faveur du climat contribuent également à l’amélioration de la productivité globale.
Toutefois, compte tenu des montants élevés atteints désormais par la dette, peut-on définir un seuil maximum qu’un État peut soutenir ? Répondre à cette question est difficile tant les variables sont nombreuses : structures de production, endettement dans sa propre monnaie ou devise étrangère, taux d’épargne des ménages...
Certains économistes avancent des niveaux limites de 90% du PIB pour les pays développés et 60% pour les pays émergents au-delà desquels la dette deviendrait contreproductive à la croissance.
Taux d’intérêt et taux de croissance
Le point fondamental dans le contexte actuel semble bien être le niveau des taux d’intérêt. Il devrait demeurer inférieur au taux de croissance de manière à limiter la croissance du service de la dette. D’où l’importance bien comprise des banques centrales de contenir la hausse des taux d’intérêt et de maintenir une politique monétaire très accommodante.
Notons également que la perception des investisseurs quant à la qualité de la signature souveraine est importante dans la détermination de la soutenabilité de la dette publique.
Le remboursement en question
Il peut y avoir trois facteurs principaux pour alléger le poids de la dette : le retour de la croissance économique (dont le potentiel restera faible à moyen terme), la hausse des impôts (ce qui est difficile politiquement) ou la hausse de l’inflation (qui est validée partiellement par les banques centrales).
Certains économistes et responsables politiques sont convaincus qu’il est impossible de rembourser la dette sans imposer une sévère politique d’austérité. Cette politique aurait des conséquences sociales importantes.
Faut-il annuler la dette ?
D’un autre côté compte tenu de ces limites, certaines voix s’élèvent en faveur d’une solution plus radicale : l’annulation d’une partie de la dette ! Si c’est envisageable du point de vue théorique, surtout pour les actifs détenus désormais par les banques centrales dans le cadre de la monétisation des dettes publiques depuis dix ans, la démarche pourrait toutefois être lourde de conséquences quant à la crédibilité des États, dégradant la perception des investisseurs sur la qualité des signatures souveraines.
Quel que soit le scénario de sortie de crise, la soutenabilité des finances publiques constituera un enjeu majeur des prochaines années. Le sujet va probablement s’inviter aux débats des prochaines échéances électorales en Europe.