Panorama économique
Afin de mieux cerner les prévisions de croissance de l’économie mondiale en 2019, il est intéressant de faire un bilan sur les chiffres de croissance du PIB du premier trimestre des principales grandes zones géographiques.
Après une fin d’année 2018 compliquée, les performances économiques de la zone euro pouvaient potentiellement de nouveau décevoir. Finalement, la publication d’une progression de 0,4% de l’activité sur ce début d’exercice s’est révélée rassurante, car deux fois supérieure au rythme observé au trimestre précédent (cf. graphique ci-dessous). Plusieurs raisons expliquent ce léger mieux par rapport aux anticipations des économistes (+0,3%). En premier lieu, l’Italie est sortie de récession (c’est-à-dire deux trimestres consécutifs de baisse de la production) avec une hausse de 0,2% du PIB. En second lieu, l’Espagne continue d’aligner les bonnes statistiques avec une croissance de 0,7% sur les trois premiers mois de l’année. Enfin, l’Allemagne qui avait « flirté » avec le risque récessionniste au quatrième trimestre, enregistre un rebond de 0,4% de sa croissance. La petite déception vient de France avec une progression de son PIB (+0,3%) comparable aux deux trimestres précédents. Visiblement, malgré la hausse de +0,7% de leur pouvoir d’achat, les ménages ont préféré « jouer » la sécurité en limitant leur consommation (+0,4%).

Au-delà des données macro-économiques de ce premier trimestre globalement proches des anticipations, peut-on espérer une poursuite plus vigoureuse de l’activité sur les prochains trimestres ?
À ce jour, les indicateurs avancés montrent encore des configurations mitigées, qui laissent suggérer une croissance économique « poussive » pour l’ensemble de l’année. Selon les spécialistes, celle-ci ne devrait pas dépasser la barre de 1,3% en 2019.En effet, les enquêtes de confiance réalisées auprès des directeurs d’achat indiquent un tassement des affaires dans le secteur manufacturier. Les séquelles observées à l’automne dernier dans le domaine industriel européen ne se sont pas toutes résorbées. À commencer par le secteur automobile, dont le poids des stocks demeure à ce jour trop élevé, particulièrement en Allemagne. Il faudra encore de nombreux mois d’ajustement de la production pour effacer les difficultés liées au changement des normes anti-pollution et au fort ralentissement des ventes automobiles en Chine. Par ailleurs, les menaces de relèvement des taxes douanières sur les véhicules européens exportés aux États-Unis restent d’actualité, même si la potentielle mise en application a été repoussée de six mois par l’administration américaine.
Heureusement, le secteur des services montre une meilleure résilience. L’indicateur avancé publié par Markit est parvenu à rester au-dessus de la barre des 50 points, indiquant par ce fait une poursuite de la croissance pour ce segment de l’économie (cf. graphique ci-dessous).

Par ailleurs, le consommateur de la zone euro devrait pouvoir être un des supports principaux de la croissance européenne. La baisse régulière du taux de chômage, l’augmentation progressive des salaires et les soutiens budgétaires organisés dans des déférents pays comme la France, l’Italie et l’Allemagne sont de nature à favoriser la bonne tenue de la consommation.
Aux États-Unis, le sentiment d’une fin de cycle économique est toujours aussi légitime. Cependant, la progression de 3,2% du PIB (en annualisé) au premier trimestre démontre encore une fois que la croissance américaine demeure vigoureuse. Mais pour autant, il ne faut en rien « tomber dans l’euphorie ». En effet, au-delà de l’aspect facial de ce chiffre, les sous-composantes du PIB sont décevantes. La demande interne est faible, qu’elle concerne aussi bien la consommation que les investissements. La contribution des stocks et du commerce extérieur, par nature plus volatile, a constitué la bonne surprise de ce début d’année, mais devrait « jouer » moins favorablement lors des prochains trimestres. Toutefois, comme en Europe, le consommateur américain restera un des piliers de la croissance américaine. La dynamique de l’emploi demeure favorable. Les créations d’emplois restent élevées en avril, et le nouveau repli de 0,2% du taux de chômage permet à celui-ci d’atteindre son niveau le plus bas depuis 49 ans à 3,6% ! En parallèle, la progression régulière des salaires, dans un contexte qui demeure pour l’instant faiblement inflationniste (à surveiller néanmoins les conséquences des taxes douanières sur les produits importés chinois), ajoute un complément de pouvoir d’achat pour les ménages américains. Ceux-ci ont donc toutes les raisons pour demeurer optimistes. Cela se traduit par les différentes enquêtes de confiance réalisées auprès des consommateurs. Parmi celles-ci, l’étude du Conference Board qui montre une hausse de l’indice de confiance de 5 pts à 129,2 en avril, un chiffre peu éloigné des plus hauts historiques touchés en 1999 et en octobre 2018. Le seul bémol à ce jour concerne l’évolution du sentiment général des chefs d’entreprises. Ce dernier est plus nuancé, sans pour autant faire apparaître à ce stade de quelconques inquiétudes pour l’avenir. L’indice ISM manufacturier, qui mesure le niveau de confiance des directeurs d’achat dans le secteur industriel, perd 2,5 pts en avril à 52,8, et revient sur son niveau le plus faible depuis 2016. Les incertitudes qui concernent l’évolution des négociations commerciales entre américains et chinois sont toujours au centre des préoccupations des décideurs économiques. L’absence d’accord imminent sur ce sujet, et la poursuite « du bras de fer » de D. Trump avec ses partenaires économiques pourraient générer un climat d’instabilité peu propice au développement des affaires. Cependant, à ce jour, les perspectives de croissance de l’économie américaine ne sont pas remises en cause pour 2019 avec un PIB qui pourrait progresser de 2,8% selon la récente étude de l’OCDE.
Marchés Financiers
Le célèbre dicton boursier sell in may and go away s’est une nouvelle fois vérifié. Cette consolidation des marchés financiers n’est pas en soi une réelle surprise après une hausse moyenne de 15% sur les 5 premiers mois de l’année pour l’ensemble des indices. Une des principales inconnues des investisseurs était le motif du déclenchement de ces prises de profit. Et encore une fois, comme c’est souvent le cas depuis bientôt 18 mois, c’est D. Trump qui a de nouveau mis la pression sur les négociations commerciales sino-américaines, en refusant de signer un accord qui semblait pourtant « à portée de main ». La demande de la Maison Blanche de réduire sensiblement les relations entre les entreprises US (clients et fournisseurs) avec Huawei, le grand spécialiste chinois des télécommunications, ne fait qu’aggraver les relations entre les deux grandes puissances. Dans ces conditions, les indices américains, tels que le S&P 500, qui avaient réussi la performance de revenir sur leurs plus hauts historiques, ont de nouveau « buté » pour la troisième fois sur les mêmes niveaux que précédemment (cf. graphique ci-dessous). L’indice américain s’est ainsi replié de plus de 5%, et les valeurs technologiques, incarnées par l’indice Nasdaq Composite de 7%.

Fort logiquement, les marchés européens ont également été contrariés par ce regain de tension sur le front géopolitique, avec une guerre commerciale qui semble se transformer en guerre technologique.Les grandes valeurs européennes, à l’image de l’indice Eurostoxx 50, ne sont pas parvenues à repasser au-dessus des points les plus hauts de l’année dernière, avant de céder devant des prises de bénéfices. Compte tenu des récents évènements de ces derniers jours sur le plan politique, en intégrant également les récentes tensions dans le détroit d’Ormuz où transite 35% du pétrole brut consommé dans le monde, les investisseurs devraient faire preuve d’une relative retenue sur les marchés d’actions.
Par ailleurs, les publications des sociétés à la suite du premier trimestre 2019 ne sont pas de nature à transformer l’ordre des choses à court terme. Les profits annoncés sur les trois premiers mois de l’année et les commentaires post-résultats des chefs d’entreprises ne vont guère modifier les anticipations des analystes financiers sur l’ensemble de l’exercice 2019. Les bénéfices par action des entreprises sont attendus en hausse de 7% en Europe et de +4% sur le continent nord-américain.