En direct avec nos experts

Conjoncture et marchés

Panorama économique

L’optimisme sur les aspects sanitaires alimente les espoirs de rebond économique.

Le sujet de la pandémie reste toujours incontournable à ce jour. La « course contre la montre » continue, et oblige les autorités politiques à maintenir encore des contraintes sociales et économiques. Pour tirer un trait (définitif ?) sur cette pandémie, la seule solution à court terme consiste à vacciner le maximum de personnes dans un minimum de temps. Cette priorité recherchée par tous les pays est cependant soumise à des conditions opérationnelles variables d’une zone géographique à une autre. Il faut en effet disposer d’une quantité de vaccins suffisante pour répondre aux besoins de sa population.

Néanmoins, au-delà de ces incertitudes actuelles, il convient d’être raisonnablement optimiste à moyen terme sur la capacité des gouvernements à maîtriser définitivement cette crise sanitaire. En effet, la production des vaccins actuels monte en charge, et ils seront bientôt associés à de nouveaux produits (Johnson & Johnson et Novavax rapidement). Dans le cadre d’un tel scénario, les spécialistes commencent à évoquer le moment où la population d’un pays pourrait atteindre l’immunité collective (soit 70% de la population vaccinée ou déjà contaminée). Parmi les grands pays, les États-Unis et le Royaume-Uni pourraient atteindre cet objectif au début de l’été. Pour l’Europe continentale, il faudra patienter quelques mois de plus. Et parfois plus pour certains pays émergents qui font face à une nouvelle vague de contaminations (Inde, Brésil...).

Néanmoins, la reprise de l’économie mondiale en 2021 ne fait plus débat à ce jour. D’autant que l’ensemble des indicateurs avancés qui mesure le rythme des affaires est déjà encourageant, malgré la présence de nombreuses contraintes qui brident encore l‘activité.

Les principales interrogations des économistes vont principalement concerner l’ampleur et la vitesse du redressement de la production mondiale.

Selon les experts de l’OCDE, la réponse à ces questions dépendra, comme évoqué précédemment, de l’efficacité des campagnes de vaccination et des soutiens budgétaires pour accompagner cette sortie de crise. Dans une hypothèse favorable, la croissance mondiale pourrait revenir fin 2021 sur le niveau qu’elle aurait atteint sans l’apparition de la pandémie. Une performance principalement liée à deux grandes zones géographiques.

Schémas possibles de croissance mondiale
Schémas possibles de croissance mondiale (Source : OCDE – Mars 2021).

En premier lieu, grâce à la Chine qui a déjà montré l’exemple en 2020 en parvenant à maîtriser rapidement le virus. En second lieu, grâce aux États-Unis qui actionnent deux effets de levier : une vaccination de masse à priori réussie et des dépenses budgétaires qui mettent en jeu des montants particulièrement importants. En effet, un premier plan de 1 900 Mds $ est déjà opérationnel pour soutenir en grande partie les ménages américains. Il devrait être suivi (en fonction d’un compromis qu’il faudra valider au Congrès) d’un autre plan de 4 000 Mds $ sur 8 ans qui va se partager entre des subventions pour améliorer les infrastructures et l’environnement, et un autre volet qui concernera le social. Ce dernier sera dévoilé dans les prochains jours. Le PIB américain pourrait ainsi croître sur un rythme proche de 10% lors des prochains trimestres (en annualisé) et de l’ordre de +6% sur l’ensemble de l’exercice 2021.

Les anticipations inflationnistes augmentent

L’Amérique retrouve ainsi son rôle de puissance économique. Mais cette situation que l’on pourrait presque qualifier d’euphorie économique, devrait générer quelques effets collatéraux comme le retour de l’inflation. Certes, l’idée de sortir d’une décennie passée aux portes de la déflation n’est pas pour déplaire à la Banque Centrale américaine. Cependant, si les opérateurs de marché s’attendent à une forte hausse des prix de détail au printemps (probablement supérieure à +3% contre +2,6% sur le mois de mars), ils pourraient néanmoins être surpris par la vigueur de ces chiffres.

Évolution et prévisions de l’inflation aux États–Unis
Évolution et prévisions de l’inflation aux États–Unis (Source : Deutsche Bank – Mars 2021).

Mais, c’est plutôt l’évolution des prix sur le moyen terme qui interpelle. Reviendra-t-on sur une tendance similaire aux années précédentes ? Ou sommes-nous rentrés dans une ère différente, marquée par une hausse durable des prix des matières premières (énergétiques, industrielles et agricoles), par une nouvelle répartition de la valeur ajoutée souhaitée par le président américain et par une hausse de l’ensemble des coûts liés aux changements climatiques ? Réponse dans un an ou deux

Marchés Financiers

Des tensions supplémentaires sur les taux d’intérêt

Les marchés financiers s’inscrivent résolument dans un scénario optimiste quant à la sortie de la pandémie en s’appuyant tant sur les données sanitaires que sur le soutien très actif apporté à l’économie américaine.

Le fait marquant de ce premier trimestre reste sans conteste la hausse sensible des taux d’intérêt à long terme aux États-Unis qui ont progressé de 0,70%. Cette progression traduit l’accélération notable des perspectives de croissance de l’économie américaine et leurs répercussions sur les anticipations d’inflation. Si ce sujet est encore lointain pour l’Europe, le débat est intense outre-Atlantique sur l’aspect transitoire de cette poussée inflationniste, dont les conséquences peuvent être significatives pour l’ensemble des classes d’actifs.

Performance des classes d’actifs en 2021
Performance des classes d’actifs en 2021.

Dans le contexte actuel, les marchés actions prennent en compte l’accélération des révisions en hausse des perspectives bénéficiaires des entreprises du fait d’une croissance révisée en hausse. Il faut noter à ce sujet le déplacement en 2021 du centre de gravité de la croissance mondiale de la Chine vers les États-Unis qui devraient ainsi dépasser en fin d’année leur rythme de croissance potentiel de moyen terme proche de 4% en termes nominaux (PIB réel + inflation). Du point de vue de la psychologie des marchés, l’accélération du cycle économique l’emporte sur les aspects sanitaires et les risques se déplacent plus vers des préoccupations liées au timing du futur resserrement de la politique monétaire de la FED : on parle là d’une réduction des montants mensuels alloués aux rachats d’obligations dans le cadre de son Quantitative Easing à l’horizon fin 2021. Il s’agira probablement d’un point d’inflexion majeur pour les classes d’actifs, dont l’anticipation ira croissante avec l’éventuelle avancée supplémentaire des anticipations d’inflation.

Dans l’intervalle, l’environnement nous parait toujours porteur pour les marchés financiers, principalement pour les marchés actions. Nous demeurons toujours très prudents sur les placements obligataires souverains, surtout américains, en raison d’un risque de tensions supplémentaires sur les taux d’intérêt. Les taux à 10 ans pourraient ainsi tendre vers le seuil de 2% qui prévalait avant la crise Covid. Le mouvement devrait rester plus limité sur les taux européens, en fonction de la réouverture réelle des économies

Les marchés américains devraient profiter d’une forte croissance.

Tout en restant positive globalement sur la classe d’actifs, notre vision sur les marchés d’actions évolue au sein des zones à privilégier. Nous sommes amenés à dégrader à neutre notre opinion sur les actions émergentes dans la mesure où leur positionnement relatif vis-à-vis des autres régions se dégrade à court terme. Nous basons cette évolution importante de notre allocation sur des éléments fondamentaux qui tiennent d’une part au ralentissement orchestré de l’économie chinoise via le pilotage des crédits, et d’autre part à de nouvelles dégradations sanitaires dans certains pays phares (Brésil, Inde) qui menacent une reprise de l’activité déjà fragile. Ces incertitudes de croissance de court terme s’accompagnent d’évolutions traditionnellement défavorables à une surperformance des pays émergents : hausses des taux d’intérêt américains et du dollar. Enfin, les tensions géopolitiques entre Chine et États-Unis pourraient reprendre de l’ampleur prochainement.

Cette réserve qui s’interprète sur un plan tactique ne remet pas en cause les bonnes perspectives de croissance à moyen terme anticipées plus particulièrement pour l’Asie du Sud-Est qui repose sur la montée en puissance des classes moyennes. Nous serons très probablement amenés à redevenir plus positif au terme du choc de croissance expérimentée par les États-Unis.

À ce propos, et de manière parallèle, nous upgradons notre opinion sur les actions américaines pour la deuxième fois consécutivement dans le cadre de nos réflexions mensuelles. Nous entendons ainsi exprimer notre confiance dans la politique de l’administration Biden dont les mesures extrêmement volontaires, tant sur le plan monétaire que fiscal, sont susceptibles de replacer l’économie américaine sur une trajectoire dynamique durable qui offre un potentiel de hausse supplémentaire aux indices de marchés même en intégrant la performance significative du premier trimestre. La valorisation élevée des marchés américains est justifiée à l’aune des révisions haussières des résultats. Nous renforçons ainsi les actions US au sein de l’ensemble de nos profils.

Nous conservons également une opinion positive sur les marchés européens en estimant qu’ils sont particulièrement bien positionnés pour tirer profit de la poursuite du mouvement de rééquilibrage des portefeuilles vers des valeurs plus cycliques ou décotées au fur et à mesure du raffermissement du scénario de réouverture des économies européennes au début de l’été. Cet enjeu, fondée sur la montée en puissance de la vaccination, confirmée pour le moment, est essentiel pour ne pas relancer les craintes de risques politiques à l’approche de l’automne.

Enfin, nous entérinons une attitude plus positive sur le dollar à court terme en considérant que la hausse du différentiel de taux d’intérêt en faveur des États-Unis vis-à-vis du reste du monde devrait être la variable essentielle dans un premier temps. Notre approche reste plus nuancée à moyen terme du fait de la problématique des déficits courants et budgétaires et de la concurrence croissante d’autres devises dans les échanges internationaux, du moins dans certaines régions du monde.