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Conjoncture et marchés

Panorama économique

Un monde coupé en deux pour cette fin d’année.

À court terme, c’est de nouveau l’évolution du virus qui impose son tempo. Le monde occidental, et en particulier l’Europe et les États-Unis subissent le développement d’une seconde vague de la Covid-19. Contrairement aux anticipations initiales, les prévisions de croissance sur le dernier trimestre 2020 sont revues en baisse dans tous ces pays. Une rechute de la croissance pour l’Europe, et peut être aux États-Unis, sont à prévoir pour le dernier trimestre de l’année. En effet, ces pays doivent faire face à une forte hausse des contaminations menaçant la logistique des systèmes hospitaliers. Les gouvernements ont donc imposé des nouvelles restrictions de mobilité, et des fermetures de nombreuses activités commerciales. Or, cette période est charnière pour redynamiser la consommation avec l’approche les prochaines fêtes de Thanksgiving et de Noël. Les espoirs d’une reprise en v durable, telle qu’elle était envisagée initialement, sont abandonnés à ce jour. Une baisse du PIB de la zone euro au 4e trimestre est donc devenue le scénario central, matérialisant la symbolique en w de l’évolution de la croissance sur ce second semestre. La seule nouvelle favorable dans une telle configuration est liée au déconfinement progressif qui permettrait à l’économie de reprendre rapidement ses forces, sans pour autant risquer l’arrivée d’une troisième vague en attendant une vaccination de grande ampleur. Comme illustré dans le graphique ci-dessous, le PIB serait alors sur une tendance haussière pendant plusieurs trimestres avant de retrouver son niveau de fin 2019 dans le courant de l’année 2022.

Croissance économique dans la zone euro
Croissance économique dans la zone euro (Source : Exane BNP - novembre 2020).

Situation plus rassurante en Asie, où les autorités politiques sont parvenues à maîtriser jusqu’à présent la crise sanitaire. Le meilleur exemple en la matière est probablement ce qui se passe actuellement en Chine. En effet, toutes les statistiques récentes montrent que l’économie fonctionne correctement sans contraintes particulières. En octobre, les ventes de détail progressent de 4,3% et la production industrielle enregistre une progression de 6,9%. Mais ce sont les informations sur la mobilité qui nous indiquent que la vie de tous les jours a retrouvé son rythme d’avant. Les déplacements en métro sont de nouveau conformes à la situation pré crise, et le nombre de vols aériens domestiques est aujourd’hui comparable à celui que l’on connaissait fin 2019 (cf. graphique 2).

Évolution du nombre de vols aériens en % depuis le début d’année
Évolution du nombre de vols aériens en % depuis le début d’année (Source : HSBC - novembre 2020).

Mais au-delà des incertitudes immédiates, tous les regards des économistes seront maintenant orientés vers l’année 2021.

Là aussi, ce sont les progrès de la recherche médicale qui feront évoluer les anticipations de croissance. La découverte de plusieurs vaccins efficaces (11 produits sont actuellement en dernière phase de recherche dans le monde, et certains sont probablement déjà inoculés chez des patients Chinois et Russes) serait de nature à modifier complètement le visage du monde tel qu’il se présente aujourd’hui. Or, les annonces récentes par les laboratoires Pfizer BioNTech et par Moderna sur la forte efficacité de leur candidat vaccin laissent penser qu’un début de commercialisation à grande échelle est proche. Certains spécialistes évoquent même décembre pour les premières injections, si les autorités sanitaires américaines donnent rapidement leur agrément. Dans cette configuration, alors que ces produits médicaux sont déjà en production, une vaccination à grande échelle au cours du premier semestre 2021 est réaliste.

Un tel scénario permettrait alors aux gouvernements de lever toutes les interdictions actuelles, permettant alors à la croissance de rebondir sensiblement en 2021. Une accélération sur le second semestre est prévisible au fur et à mesure qu’une grande partie de la population mondiale sera vaccinée.

D’autres éléments viendront également influencer l’ampleur de la reprise.

Le premier est d’ordre psychologique et concerne l’évolution de la confiance des acteurs économiques. Ces derniers seront influencés par le degré de probabilité de retrouver plus ou moins rapidement une vie et des déplacements normaux. À défaut de se « débarrasser » rapidement de la Covid-19, le sentiment d’une situation sanitaire définitivement sous contrôle est susceptible d’amplifier la réaction des chefs d’entreprises et des consommateurs. Ces derniers ont par ailleurs accumulé depuis des mois une épargne considérable qui ne demande qu’à être dépensée. Il faut pour cela des vaccins efficaces, une libéralisation de l’économie et un marché de l’emploi qui reprend de la vigueur. Un « cocktail » de bonnes nouvelles qui semble réaliste à la vue des dernières informations.

Il faudra également tenir compte des supports budgétaires et monétaires qui resteront présents pendant de longs mois, même si le contexte économique et sanitaire s’améliore. Les états vont devoir s’affairer pour relancer l’activité, et notamment aider tous les secteurs qui ont été lourdement touchés. On peut évoquer les métiers qui concernent le tourisme, l’hôtellerie et restauration, le culturel, l’événementiel, les loisirs et l’ensemble du secteur aéronautique. En parallèle à ces efforts budgétaires qui vont creuser encore plus les déficits publics, les banques centrales n’auront d’autres choix que de maintenir les taux d’intérêt le plus bas possible.

Performance relative annuelle mondiale du secteur croissance vs secteur cyclique
Performance relative annuelle mondiale du secteur croissance vs secteur cyclique (Source : JP Morgan Casenove - novembre 2020).

Sur la même période, les marchés obligataires souverains sont restés peu ou prou proches des rendements qu’ils affichaient le mois précédent. Seul le T-bond américain à 10 ans a montré dès le mois d’octobre quelques signes de tension dans la crainte d’une « vague bleue démocrate » aux élections présidentielles.

En revanche, les actifs dits « refuges » comme l’or, les mines d’or, le yen, le franc suisse et indicateur de volatilité ont connu fort naturellement des prises de bénéfices dans cette période où les investisseurs se sont montrés acheteurs d’actions

Marchés Financiers

Quelle année ! L’évolution des marchés financiers depuis janvier dernier est tout à fait spectaculaire avec des écarts souvent impressionnants. Les derniers en date sont la double conséquence d’événements politique et sanitaire.

Dans un premier temps, les bourses ont progressé dans l’anticipation (et la concrétisation) d’un nouveau président américain sous les couleurs démocrates. Une normalisation de la vie politique et un apaisement des tensions internationales (sauf avec la Chine) devraient ainsi favoriser la relance des affaires.

Et dans un second temps, c’est l’annonce par le duo Pfizer - BioNTech d’un candidat vaccin efficace qui a « embrasé » les marchés financiers. Alors que l’eurostoxx 50 venait déjà de conclure la semaine du 2 au 3 novembre sur une hausse de 8,3%, cet indice a de nouveau progressé de plus de 6% lors de la seule séance du lundi 9 novembre dès l’officialisation des résultats de ce nouveau traitement contre la Covid. Le laboratoire américain Moderna a également embrayé avec des informations tout aussi positives poussant également les marchés financiers un cran plus haut.

Les investisseurs se sont donc empressés d’anticiper un retour (rapide ?) au  monde  » en 2021. La maîtrise mondiale de la pandémie devrait donc mettre fin aux restrictions actuelles et libérer durablement le monde économique et social. Cette hypothèse crédibilise ainsi un fort rebond de la croissance du PIB dans toutes les zones géographiques l’année prochaine.

Mais ces différents évènements ont également servis de catalyseurs à une impressionnante rotation sectorielle. Les cours des entreprises cycliques ont été durement sanctionnés depuis le début de l’épidémie, étant par nature très sensibles à la bonne santé de l’économie mondiale. Inversement, les spécialistes du monde de la santé, les grandes valeurs technologiques (dont les fameuses GAFAM), et plus généralement toutes les valeurs dites stay-at-home (entreprises qui profitent des confinements) ont vu leurs cours largement surperformer. Changement de décor début novembre avec l’anticipation de l’élection de Joe Biden, et surtout, avec les annonces sur l’efficacité de futurs vaccins contre la Covid. Les secteurs cycliques (ou values) ont alors rattrapé une partie de leur retard dans l’espoir d’une normalisation de l’activité dans les prochains mois. Les banques européennes, principales victimes de la récession et des taux d’intérêt bas, ont progressé en moyenne de 34% depuis le début du mois de novembre. Parcours globalement similaire (+30%) pour les valeurs liées au pétrole, tandis que le secteur de la santé « marquait le pas » (+8%) en relatif.