Panorama économique
Les chiffres du PIB en zone euro au quatrième trimestre 2018 étaient attendus avec une relative anxiété par les spécialistes compte tenu de la faiblesse des indicateurs avancés sur les derniers mois de l’année. Finalement, la progression de 0,2% de la production sur l’ensemble de la zone euro (soit +1,8% en moyenne sur 12 mois après +2,4% en 2017 – cf. graphique ci-dessous) confirme les prévisions et le sensible ralentissement de la dynamique des affaires. Mais, l’analyse pays par pays suscite des commentaires circonstanciés. Un fois de plus, l’Espagne consolide sa place de leader avec une progression de 0,7% de sa croissance sur le dernier trimestre, et de +2,5% sur l’ensemble de l’année. Les statistiques françaises (+0,3%) sont proches des anticipations. Sans réelle surprise, la consommation des ménages marque le pas compte tenu des mouvements sociaux, et les investissements ralentissent (+0,2% après +1% entre juillet et septembre). La bonne nouvelle vient de la dynamique des exportations, un élément qui reste particulièrement volatile chaque trimestre. Si l’Allemagne échappe à priori à la notion de récession technique (c’est-à-dire un repli du PIB sur deux trimestres consécutifs), ce n’est pas le cas de l’Italie. Les trois derniers mois de l’année se terminent sur une baisse de 0,1% de la croissance après -0,2% au troisième trimestre 2018. De nombreuses interrogations émergent quant à la capacité du gouvernement italien à pouvoir générer suffisamment de croissance afin d’éviter un dérapage du déficit budgétaire au-delà de l’accord validé par les autorités de Bruxelles en 2019 (-2,04%).
Dans cette optique, les récentes prévisions de la Commission Européenne ne sont guère rassurantes. En effet, les anticipations de croissance de l’Italie en 2019 sont sensiblement révisées à la baisse sur la dernière enquête publiée à l’automne 2018. Les nouvelles données n’entrevoient qu’une croissance italienne de +0,2% sur l’ensemble de l’exercice en cours. L’Allemagne n’échappe pas non plus à ce mouvement d’ajustement vers le bas des prévisions. Le PIB allemand, victime du ralentissement de l’économie mondiale et des difficultés de son secteur automobile, ne devrait afficher qu’une progression de son activité limitée à +1,1%, soit deux fois moins bien que la performance réalisée en 2017. Ces prévisions sont par ailleurs particulièrement incertaines, car soumises à des considérations géopolitiques délicates à quantifier. Pour autant, le risque d’une aggravation supplémentaire de la dynamique économique en Europe est-il envisageable ? Cela pourrait être effectivement le cas si toutes les menaces actuelles se concrétisent, à savoir un Brexit sans accord, une nouvelle détérioration des relations commerciales avec les américains, ou encore une poursuite du ralentissement de l’économie chinoise. Cependant, en dehors de ces menaces, il convient de demeurer constructif sur les perspectives de la conjoncture européenne. La France est un bon exemple en la matière. Même si l’indicateur PMI composite publié récemment par l’organisme Markit est encore décevant sur février en se cantonnant sous la barre psychologique des 50 points (niveau justifiant un repli de la production), l’étude équivalente réalisée par l’INSEE sur un échantillon plus large d’entreprises (4 500 contre 500 pour Markit) indique une stabilité du climat des affaires en France au-dessus de sa moyenne historique. Un rebond du moral des consommateurs français est également un autre élément rassurant. Celui-ci connait en janvier sa plus forte reprise mensuelle (+5 pts à 91) depuis juin 2017. Dans ces conditions, tout porte à croire que la consommation devrait se reprendre sensiblement au 1er trimestre, portée par une amélioration du pouvoir d’achat et un effet de rattrapage.
Dans le sillage des informations communiquées en décembre dernier, l’économie américaine est bien engagée dans un ralentissement progressif, mais qui n’apparait pas comme source d’inquiétude à ce jour. Par ailleurs, il se peut que les récentes statistiques soient impactées par la fermeture partielle de l’administration américaine (shutdown) qui aura été le plus long de l’histoire des États-Unis. Les données économiques du mois de janvier sont ainsi globalement rassurantes. Pour en juger, il suffit de remarquer le rebond de l’indice ISM, une des principales références du niveau de confiance des patrons américains. Dans le secteur manufacturier, l’ISM progresse de 2,5 pts, en grand partie tiré par les nouvelles commandes. Le sensible repli des ventes de détail en décembre (-1,2%) est plus surprenant. L’explication peut être liée au timing de cette enquête réalisée en pleine déprime boursière et en début de shutdown. Cependant, sauf nouvelles crispations sur le plan politique, il n’y a pas de raison objective de s’alarmer pour le moment des perspectives de l’économie américaine. Soutenu par la hausse régulière des salaires, par une dynamique du marché de l’emploi et sans endettement excessif, le consommateur américain devrait rester l’acteur essentiel de la croissance des prochains trimestres.
Dans l’ensemble des zones géographiques, la chute de 45% des cours du pétrole sur le dernier trimestre 2018, et le ralentissement économique mondial auront lourdement pesé sur les anticipations d’inflation (cf. graphique ci-dessous). Celles-ci se sont écroulées, notamment en Europe, entraînant dans son sillage les rendements des obligations souveraines des principaux pays occidentaux.
Depuis, les cours du pétrole se sont redressés et les anticipations de récession aux États-Unis sont moins d’actualité à court terme. Si ce scénario devait se confirmer, qu'en sera-t-il alors des prévisions d’inflation ? Un sujet qui pourrait revenir sur le devant de la scène au second semestre.
Marchés financiers
Les mois se suivent et, heureusement, ne se ressemblent pas ! Si décembre s’était traduit par la plus mauvaise performance des actions américaines (-9,2%) depuis 1931, le début d’année se caractérise par un rebond spectaculaire de +7,9%, soit le meilleur mois de janvier depuis 1987. Quelles sont les raisons qui expliquent un tel écart de performance des indices en si peu de temps, qu’ils soient localisés en Europe et outre-Atlantique ?
L’exercice précédent s’est achevé dans un contexte de grandes incertitudes économiques sur fond de discordes commerciales entre les États-Unis et le reste du monde, dont la Chine. Les principaux indicateurs avancés montraient des signes de faiblesse, laissant prévoir un net ralentissement de la croissance mondiale, voire la probabilité d’une récession en Amérique du Nord dès le second semestre 2019. Eu égard au bon parcours des valeurs américaines depuis plusieurs années, et notamment celui des valeurs technologiques, les investisseurs en ont profité pour prendre des bénéfices. La faiblesse du marché leader a entraîné dans son sillage toutes les autres grandes places financières.
Début 2019, la banque centrale américaine a modifié la tonalité de son discours avec une observation plus attentive de la situation économique et du stress des investisseurs. Ces derniers ont donc logiquement anticipé une pause dans le mouvement de normalisation des taux directeurs et dans la réduction de la taille du bilan de la Fed. Il n'en fallait pas plus pour redonner confiance aux opérateurs de marché, soulagés par le repli des rendements obligataires. En parallèle, les négociations commerciales sino-américaines semblaient se dérouler positivement, avec une bonne volonté de l’ensemble des deux parties. Plusieurs tweets de D. Trump ont d’ailleurs relayé la possibilité de concrétiser un accord.
Sur le plan micro économique, les publications des résultats des entreprises n’ont pas entraîné un retournement à la hausse des prévisions des analystes financiers sur 2019. Le momentum négatif est simplement ralenti, ce qui permet cependant d’anticiper une croissance des profits des sociétés de l’ordre de +8% en Europe et de +5% aux États-Unis.
C’est ainsi que le fort rebond des indices depuis les points bas du 27 décembre, associé à une croissance modeste des bénéfices par action des entreprises se traduit pas une sensible revalorisation des marchés en l’espace de deux mois comme le montre le graphique ci-dessous.